Les inhibiteurs des tyrosines kinases, dont le tarceva, sont responsables d'effets secondaires cutanés fréquents et connus:
- la prise de Tarceva sensibilise la peau au soleil, les expositions solaires même brèves ou paraissant anodines peuvent déclencher un coup de soleil (manger sur la terrasse, faire le jardin, faire des courses au soleil). Il faut donc savoir éviter les endroits ensoleillés, se protéger avec un chapeau, des vêtements et de la crème solaire indice 50 + ;
- l'éruption de boutons sur le visage et/ou le corps apparaissent dans les premiers jours de la prise. Cette éruption dure généralement deux à trois mois. Elle se traduit par des rougeurs sur le visage, le décolleté le cuir chevelu et même sur le tronc, voire les jambes et les bras (ça ressemble parfois à de l 'acné). Cela entraîne des douleurs à type de brulures et des démangeaisons. Sur le visage cela peut entrainer une éruption impressionnante à tel point que les personnes n'osent plus sortir de chez elles. Il est le plus souvent possible de la contrôler grâce à des soins locaux et la prise d'antibiotique de type Cyclines ;
- une sécheresse de la peau qui s'installe progressivement sur le long terme et qui peut entrainer des démangeaisons ;
- le cuir chevelu peut aussi être atteint par l'éruption entrainant des démangeaisons ou des brûlures. A long terme certains patients se plaignent aussi d'une modification de la pousse des cheveux, les cheveux sont secs et poussent plus lentement.
Voici quelques conseils concernant la prévention de la sécheresse et le traitement de l'éruption.
En prévention, dès l'initiation du traitement, je conseille de laver :
- le visage avec une "eau micellaire" : utilisez celles qui sont conseillées pour l'acné (elles sont généralement bleu/vert) car elles contiennent du cuivre et du zinc qui ont un effet apaisant.
- le corps avec un gel sans savon, là aussi, il en existe des "spécial acné", sans savon ( bleu/vert) qui seront très utiles en cas d'éruption.
Il faut hydrater le visage et le corps une à deux fois par jour, il existe un produit remboursé: Dexeryl, sinon vous pouvez demandez à la CPAM le remboursement de la préparation suivante à condition de la faire prescrire sur une ordonnance 100% et de spécifier au dessous " Préparation Médicale. à usage thérapeutique en l'absence de spécialités équivalente disponibles"( il faut récupérer la facture de la pharmacie et envoyer l'ordonnance correctement libellée avec la facture à la caisse) :
- Glycérolé d'amidon 20g
- Excipial lipolotion neutre qsp 200g
- 1 pot P.M. à usage thérapeutique en l'absence de spécialités équivalente disponibles
- proche non remboursé: ichtyane HD, baume Avène, atodermPP, atopicalm..
Dès l'apparition de la folliculite je rajoute ou remplace une des applications de glycérolé par une crème au cuivre et au zinc :
- sulfate de cuivre 0,15g
- sulfate de Zinc 0,3g
- eau purifiée 5g
- codexial cérat 100g
- P.M. à usage thérapeutique en l'absence de spécialités équivalente disponibles
- proche non remboursé: Cuivre zinc d'Uriage, Dermalibour crème, Cicalfate crème, stellatria...
Les antibiotiques (cyclines) doivent être prescrits par le médecin dès l'apparition des boutons. Il ne faut pas avoir peur de prendre le traitement en même temps que le tarceva, au contraire, cela permet de "passer un cap" et souvent les boutons finissent par s'arranger au bout d'un à deux mois.
Les Cyclines permettent de sécher l'éruption puis d'éviter sur les mois suivant de nouvelles poussées. La durée du traitement doit être suffisamment longue pour attendre que l'éruption s'éteigne seule (compter 3 à 6 mois et pour certaines personnes plus longtemps). Pour cela je préconise d'utiliser les cyclines qui sont prescrites dans le traitement de l'acné chez l'adolescent, certaines présentations permettent d'éviter les brûlures d'estomac.
Si l'inflammation est trop intense ou s'il y a des phénomènes prurigineux ou douloureux, comme dans le cas du cuir chevelu, on peut appliquer un corticoïde local prescrit par le médecin (il en existe en émulsion pour le cuir chevelu qui ne sont pas irritantes).
En cas de démangeaisons on peut rajouter un antihistaminique (Aérius, Xyzall, kestin, inorial..).
Parfois l'éruption peut s'infecter il faut alors avoir recours à des antibiotiques locaux.
Je ne connais bien que que les effets secondaires cutanés, mais dans la majorité des cas ces conseils permettent de passer le cap des premiers mois et de profiter des effets du tarceva. Il va "bloquer la tumeur" pendant plusieurs années. Si le tarceva n'est pas efficace, d'autres inhibiteurs peuvent être proposés.
Pour vous parler de mon expérience, avant les années 2000 je n'avais jamais vu des patients "vivant avec un cancer ". Je vous l'écris comme cela car même s'il faut se battre contre les effets secondaires, j'ai beaucoup de patients qui me donnent des nouvelles 4 à 5 ans après leur premier contact avec moi. Ce n'est certainement pas parfait mais j'ai confiance au travail des cancérologues , je sais qu'il trouveront et je continuerai à adapter les traitements dermatologiques aux retours d'expérience que vous voudrez bien me donner.
Toulouse
Voici le commentaire déposé par Marie Christine à la suite de ma lettre à l'AFSSAPS.
bonsoir,
je vous lis depuis un certain temps, je trouve votre blog intéressant pour les conseils pratiques que vous y notez. Mais si je puis me permettre, il me semble que vos messages peuvent laisser beaucoup de malades plein de désespoir. L'entrée dans des essais à l'IGR n'est pas aussi facile que vous laissez le supposer. Mon mari s'est rendu 2 fois à l'IGR fin année 08 avec tous les sacrifices que cela suppose (frais de déplacements car très loin de Paris, analyses, etc...).A 2 reprises un protocole a été signé (nom du médecin+Cachet) et à 2 reprises il a été signifié à mon mari un refus par tél. quelques jours avant son entrée, prétextant que les laboratoires décalaient leurs essais.Vous pouvez imaginer notre déception. Les places sont chères...
Quant à votre génome de votre cancer, combien de malades peuvent-ils se vanter d'avoir connaissance du génome de leur tumeur, vu le coût de l'étude. Vous employez également beaucoup l'adjectif "éminent" pour qualifier votre beau-frère, votre nutritionniste,etc.... je ne pense pas que tous les malades soient égaux devant la qualité des soins. Je vous souhaite néanmoins de pouvoir bénéficier de cette nouvelle molécule, mais je crains que vu son prix, tous les malades n'y aient pas accès.
Bonne continuation sur votre blog.